La transition écologique est un mouvement politique de transformation des rapports socio-productifs, afin d’avancer vers une résilience locale. Pour cela, il nous faut des nouvelles organisations engagées au service d’un mode de vie plus sain, solidaire, juste, humain, vivant. Cependant, si nous souhaitons transformer les organisations de notre société, quel type d’entrepreneurs devrions-nous encourager ? Quelles particularités devraient-elles être incorporées dans un entrepreneuriat qui vise la transition écologique ?
Quelques pistes ont été ouvertes par l’entrepreneuriat social. Mises en valeur dans les années 1980 par des organisations comme Ashoka, la fondation Skoll ou la Grameen Bank, les entreprises sociales ont remis en question les modèles de développement dominants des trente dernières années (modèles libéraux puis néolibéraux). De plus, elles ont aussi questionné la façon dont le marché mesure le succès d’une initiative entrepreneuriale : dorénavant, la rentabilité n’est qu’un moyen de créer de la valeur sociale, tout en respectant des principes éthiques pour le bien-être de l’homme et de la nature.
Ce changement de perspective nous permet alors d’explorer au moins trois facteurs clés de l’entrepreneuriat pour la transition écologique:
- Une prise en compte de la valeur globale des initiatives entrepreneuriales, qui intégrerait un travail sur la complexité (à la façon d’Edgar Morin) de l’interaction entre dimensions économiques, sociales et environnementales de l’activité productive, ainsi que son impact sur la nature.
- Une prise de conscience de la nature politique du projet entrepreneurial par rapport à la transformation des relations entre personnes et avec le monde
- Une communauté facilitatrice du travail collectif, pour le bien commun.
Pour comprendre cette complexité de la valeur, nous pourrions nous recentrer sur les besoins humains fondamentaux, puis définir, mesurer et évaluer la capacité des entreprises à répondre à nos problématiques de manière synergique.
Alors, si nous considérons que nous ne pouvons connaître que par l’expérience, que toute connaissance n’est qu’une construction sociale et que toute action répond à un projet (donc, toute action est politique), alors, il faudrait travailler sur la construction de sens et de cohérence, sur la base des principes éthiques choisis et acceptés par la communauté de soutien.
Une telle communauté n’est pas uniquement un ensemble de parties prenantes, mais un écosystème, dont chaque acteur se retrouve invariablement lié au destin de l’autre. La rencontre et le dialogue sont essentiels pour avancer dans la même direction. C’est ainsi le regard des autres qui permettrait la construction d’un projet centré sur le bien-être, à haut impact social.
Au final, un entrepreneuriat de la transition écologique ne consisterait pas seulement à créer une activité socio-productive, mais serait un prétexte à ressembler les gens autour d’un objectif particulier et concret de transformation sociale, grâce aux mécanismes du marché.
Emmanuel Paul de Kèpos